Il ne lui manquait que cette nouvelle étoile à sa jeune carrière de députée de Paris. Olivia Grégoire est une combattante qui a la force de ses convictions. Rien d’étonnant, dès lors, qu’Emmanuel Macron et Jean Castex l’aient appelé au gouvernement. Si elle a l’intérêt général chevillé au corps elle est aussi une réaliste qui regarde le monde tel qu’il est et non tel qu’une idéologie le souhaite. Hier, les « coop » comme les prenaient de haut les responsables de l’économie « traditionnelle », considérant qu’ils s’agissaient de doux utopistes, est devenu un secteur professionnel à part entière. Une troisième voie entre une économie administrée qui a montré très vite ses carences et un hyper-libéralisme qui a montré ses cruautés.
Mais sa première victoire comme responsable politique, elle n’est pas près de l’oublier. Ce fameux 9 octobre 2018 à 16h59, heure officielle où fut adoptée la loi PACTE – Plan d’Action pour la Croissance et la Transformation des Entreprises, acronyme comme en raffole la haute fonction publique – pour signifier que le gouvernement ne néglige pas la contribution des PME et des TPE afin de « booster » la croissance française. Un an d’efforts et d’ajustements en passant au tamis les 73 articles de la loi. Un an à faire une multitude d’auditions et de débats pour convaincre. Un an de sms envoyés à toutes heures du jour ou de la nuit, notamment à Emmanuel Macron, qui fut son condisciple à Sciences Po. Paris. La présidente de la « Commission spéciale en charge d’examiner le projet de loi PACTE » n’a pas ménagé sa peine ni pleuré son temps pour être à la hauteur de la mission qui lui a été confiée, affirmant dans le magazine Challenges : « Ce poste sera ce que j’en ferai »(1). Elle en a fait un succès.
La loi présentée par Bruno Lemaire devant les députés – parmi lesquels Olivia Grégoire sans doute très émue à quelques encablures de la victoire – a offert, depuis deux ans maintenant, plus d’air à ces petites entreprises. Petites entreprises qu’elle connaît d’autant mieux qu’elle avait elle-même créé la sienne auparavant. De la simplification administrative à la diminution des coûts au moment de la création, en passant par des mesures pour faciliter la reprise d’entreprise « cette loi balaie très large pour lever tous les verrous de l’économie française », comme le déclarait le ministre de l’Économie. De son coté, une évaluation du Trésor estime qu’à terme, « la loi PACTE pourrait générer à elle seule un point de PIB supplémentaire ». Les effets positifs n’ont d’ailleurs pas tardé à apparaître puisque, dans un premier temps, le chômage a régulièrement décru. Rien d’étonnant pour son amie Estelle Monraisse, patronne de l’agence Altercom qui a travaillé avec elle au MITI, le Mouvement des Entreprises de Taille Intermédiaire : « C’est une bosseuse comme je n’en n’avais jamais vu ! ». Même opinion pour Hughes Cazenave, le patron et fondateur de l’institut Opinion Way : « Olivia a une énergie et une capacité de travail hors du commun. A ceux qui lui font confiance, elle donne bien plus qu’elle ne reçoit ». Et ça aurait sans doute continué sur cette tendance si un invisible virus n’était pas venu rebattre les cartes des gagnants et des perdants. Sans doute un combat de plus pour elle. Mais qui dit que ça ne lui déplaît pas ?
Toutes ces qualités, elles étaient déjà présente lors sa campagne électorale. Une campagne menée avec rigueur et sur les chapeaux de roues. Car tout s’est fait très vite pour Olivia Grégoire. Prévenue par le comité en charge des investitures de la REM à peine quarante-huit heures avant la clôture des candidatures, elle n’a pas perdu une seconde de ce précieux temps pour rassembler tous les documents qu’exige la loi afin d’être candidat. Candidature qu’elle dépose un quart d’heure avant la clôture des inscriptions.
À la clé, un challenge qui n’est pas vraiment une promenade de santé. Elle se retrouve, dans la douzième circonscription de Paris (7ème sud et 15ème nord), face à un baron – autant dire indéboulonnable – de la droite parisienne, Philippe Goujon, député-maire sortant du quinzième arrondissement. Mais ce dernier commet l’erreur à ne pas faire quand on a en face de soi une battante comme elle : la sous-estimer et la prendre de haut. Si elle encaisse très bien les coups, elle sait aussi les rendre. Après avoir engrangé dix-sept points d’avance et frôlé la victoire dès le premier tour, son adversaire change de tactique. L’attaquant de front cette fois, avec des méthodes pas toujours très élégantes aux dires des partisans de la candidate. Mais trop tard. La « novice » en politique obtient plus de 56% des voix au deuxième tour et s’installe dans le fauteuil pour cinq ans.
Novice en politique, Olivia Grégoire ? Pas vraiment.
Une licence d’Histoire à Paris X-Nanterre, puis Sciences-Po. Paris, section Communication, et enfin un mastère spécialisé en Marketing à l’Essec, voilà pour le cursus. Même si l’entreprise était un chemin naturel à la sortie de la grande école, c’est justement dans le champ politique qu’elle déploie d’abord ses ailes, en 2002. Jean-Pierre Raffarin, devenu Premier ministre d’un Jacques Chirac fraîchement réélu, la nomme chargée de mission. Jusqu’en 2005, date à laquelle il est remplacé à Matignon par Dominique de Villepin. Dans ce nouveau gouvernement, c’est Xavier Bertrand, nommé Ministre des Affaires Sociales, qui lui propose d’intégrer l’équipe de son cabinet. Elle accepte tout naturellement puisque, comme le souligne Estelle Monraisse : « Elle fait de la politique comme elle respire. Sa vocation, c’est le débat public ».
Quitte à diviser par deux ce qu’elle gagnait quand elle avait sa propre agence de stratégie et de communication destinée aux PME et TPE, avec deux axes principaux : la Santé et le Digital. Deux domaines dans lesquels – et pour des raisons différentes – les petites boîtes sont souvent démunies et seules. Société qu’elle ferme à peine élue, devançant ainsi la « loi pour la confiance dans la vie politique ».
Membre de la Commission des Finances, Porte-parole du groupe La République en Marche, maintenant Secrétaire d’États à l’Économie Sociale et Solidaire, cette toute jeune quadra ne laisse rien au hasard. Comme elle le disait à Élise Karlin (2) qui a fait son portrait dans l’Express au début du quinquennat : « Avec mes équipes, on bosse à 360 degrés, tous les sujets. Vous pouvez avoir à répondre à un journaliste n’importe quand et sur n’importe quoi ». Des équipes choisies pour leurs compétences comme le souligne Hughes Cazenave : « Olivia choisit toujours des gens meilleurs qu’elle dans leur domaine et, grâce à sa grande et sincère capacité d’écoute, elle aime apprendre des autres ». Dans son portrait, Élise Karlin écrit : « Elle ne cache pas qu’elle a envie d’être connue, plus connue, mieux connue » (3).
Plus qu’un secrétariat d’État, Olivia Grégoire a maintenant entre ses mains une économie humaniste que beaucoup appellent de leurs vœux. L’occasion, pour celle qui est désormais connue, d’entamer son chemin vers… la reconnaissance.
1 Déclaration faite à Stéphane Lagoutte pour Challenges le 07 09 2018
2 Article signé Élise Karlin, publié le 13 08 2018 dans l’Express.fr
3 Ibid.