Dans un contexte post-dissolution, est-il encore possible de contenter les électeurs comme les marchés financiers ? Ces derniers auront très certainement leur mot à dire. Le signal donné représentera un indicateur fort, tant sur le plan politique qu’économique et sociétal, avec des conséquences manifestes sur l’état de notre pays. La France et sa situation financière seront scrutés à l’aune de la dette publique. L’heure a sonné.
La dissolution du 7 juin dernier a ouvert une séquence électorale qui ne se refermera pas avec la nomination du nouveau gouvernement.
En effet, les marchés financiers, dont le rôle n’est naturellement pas inscrit dans notre Constitution, agissent comme les véritables électeurs d’un « troisième tour ». Ils ne choisissent pas directement les membres du gouvernement ni ne dictent les orientations politiques, mais leur influence est incontestable.
Les marchés financiers, ces « autres électeurs »
Avec une dette publique approchant les 3 200 milliards d’euros, soit 110,7 % du PIB au premier trimestre 2024 selon l’INSEE, leur jugement sera aussi déterminant que celui des urnes, car ils réagiront en fonction de leurs inquiétudes.
Les créanciers de notre dette « voteront » à leur manière, en imposant une prime de risque qui augmentera immédiatement le coût du financement de l’État comme des entreprises.
Ce phénomène est déjà perceptible, avec un écart de taux d’intérêt à long terme qui a déjà dépassé les 80 points par rapport à la dette allemande à 10 ans depuis l’annonce de la dissolution.
Les marchés pourraient aussi décider de « voter avec les pieds » en cessant de prêter, affichant ainsi leur mécontentement de la manière la plus radicale.
Qu’on le veuille ou non, nos bailleurs de fonds disposent d’un droit de regard qui a des effets immédiats et tangibles
Dans ce contexte, le principal défi du nouveau gouvernement sera de naviguer entre les attentes des électeurs et celles des marchés financiers. Privilégier l’un au détriment de l’autre serait inconcevable, menaçant de déclencher soit une crise financière immédiate, compte tenu des 25 milliards d’euros d’obligations assimilables du Trésor émis chaque mois pour financer le fonctionnement de l’État, soit une crise sociale et politique, voire les deux simultanément.
Il s’agira de trouver un équilibre délicat : répondre aux attentes des citoyens tout en rassurant nos créanciers.
Ce qui pourrait apparaître comme une contrainte insurmontable est en réalité une formidable opportunité pour la France : celle de reconstruire un État fort et souverain, en allant au-delà des discours et en affrontant les réalités concrètes.
Moins de nouvelles lois mais une priorité à leur application et à l’obtention de résultats tangibles sur le terrain, ainsi qu’une réforme profonde de la gestion publique.
Telles sont les conditions nécessaires pour redonner à l’État les moyens d’assurer des services publics de qualité, d’attirer les talents et de dégager des marges de manœuvre financières intelligentes, garantes d’un avenir maîtrisé et responsable.