Transition et sobriété : les deux piliers de l’Europe de demain
L’invasion de l’Ukraine par la Russie a fait basculer l’Europe et le monde dans une nouvelle ère.
Il était auparavant possible d’imaginer le déploiement continu d’un ordre international libéral fondé sur une relative stabilité géopolitique et le libre-échange généralisé. La condition ? Le déni : il suffisait d’occulter les questions du dérèglement climatique, de l’extinction de masse des espèces vivantes, de la dépendance aux énergies fossiles ou encore de l’extraction sans limites des ressources planétaires.
La guerre russo-ukrainienne, avec son cortège de malheurs et de destructions, vient donc dissiper une grande illusion collective, celle d’une prétendue « fin de l’histoire ». La fragilité d’un ordre international qui croyait aveuglément dans les vertus pacificatrices du libre-échange éclate au grand jour. La dérive du régime de Vladimir Poutine s’est au contraire faite à l’ombre de cette croyance.
Penser l’autonomie de l’Europe
Dans le système géopolitique qui est en train de naître sous nos yeux, lui-même enchâssé dans un nouveau régime climatique qui voit la remise en question de l’habitabilité de régions entières de la planète et l’aggravation des rivalités pour les ressources stratégiques, il est désormais évident pour tout le monde – une évidence qui l’était déjà par ailleurs pour les écologistes depuis plusieurs décennies – que notre inscription dans des réseaux de dépendances toxiques est problématique.
Les Européens ne peuvent pas se permettre de rester à la merci d’un régime criminel dont l’ambition assumée est de remettre en cause simultanément l’intégrité des frontières de l’Union Européenne et le modèle de société dont elle s’est fait le porte-étendard. Dernièrement, la lâcheté des Européens face à l’opération de nettoyage ethnique menée par l’Azerbaïdjan – pays sur lequel ils comptent maintenant pour leur approvisionnement en gaz naturel – dans le Haut-Karabakh est venu nous rappeler une fois de plus l’urgence qu’il y a à sortir de notre dépendance aux fossiles.
La sobriété, opportunité pour l’Europe
Mais la transition n’est qu’un élément de la réponse. Seule, elle ne suffira pas à reconstruire les marges de souveraineté européenne, car de nouvelles infrastructures énergétiques appellent fatalement de nouvelles dépendances. C’est l’angle mort de toutes les approches techno-solutionnistes. A long terme, c’est la sobriété, conçue dans un objectif de justice sociale, qui constitue la meilleure opportunité pour l’Europe de reconquérir son autonomie sur la scène internationale.