Quand la France était une grande puissance industrielle, l’usine avait droit de cité. La petite couronne parisienne était constellée de toits en dent de scie. L’industrie faisaient partie de nos villes et de nos vies. Les « élites » choisissaient d’ailleurs massivement ces activités. Les « jobs étudiants » se faisaient couramment à l’usine. Un certain Deng Xiaoping, âgé de 21 ans, fit ainsi un passage à Renault Billancourt. Devenu numéro 1 de la république populaire de Chine, il sera l’artisan…de son décollage industriel.
Aujourd’hui toutes les grandes nations industrielles contemporaines accueillent des sites de production en ville. Shanghai, Berlin et même Boston en témoignent. À un pâté de maisons de la Harvard Business School, trône l’usine qui a vu la start-up biotech Genzyme se transformer en groupe multinational valorisé 19 milliards de dollars.
Mais dans la France désindustrialisée du XXIème siècle, les activités manufacturières ont quasiment disparu de nos centres urbains. Elles sont désormais parquées dans des zones industrielles ou zones d’activités.
Faire venir l’industrie aux Français
Or 80% des Français vivent en ville. Mettre l’industrie à l’écart, c’est donc se priver de 80% de notre potentiel industriel. À l’heure où les pénuries de main d’œuvre frappent l’industrie française, n’est-ce pas à l’industrie de venir aux Français ? D’autant que l’industrie 4.0 nécessite un recours accru aux ingénieurs qui sont surreprésentés en ville et dans les grandes agglomérations. Avoir un environnement de travail de qualité dans un quartier vivant est un vrai plus y compris pour les métiers industriels.
Invité au JT, Elon Musk, le célébrissime start-upper industriel, expliquait que l’argument massue de la France pour attirer une implantation industrielle était le charme de sa capitale. Car la ville lumière fait rêver dans le monde entier, un élément de poids dans la course aux talents.
Des implantations urbaines vertueuses
Les usines urbaines sont enfin très vertueuses. Elles n’augmentent par l’artificialisation des sols et favorisent le recours aux transports bas carbone. Elles peuvent être belles, en témoigne notre patrimoine industriel. Dans une France décrite comme « archipelisée », elles font converger dans un même endroit des personnes venues d’horizons très différents.
Si l’industrie est revenue au centre des politiques publiques, l’implantation d’usines en ville reste une gageure. Alors, stoppons la destruction du foncier industriel urbain et reconstituons le stock disponible.
Bien sûr, il faudra toujours maintenir les sites dangereux à l’écart des centres urbains, mais rappelons qu’il n’y a en France qu’un petit millier de sites Seveso sur la centaine de milliers d’établissements industriels.
Les intertitres sont de la rédaction. Cette tribune est à retrouver dans le deuxième numéro de Choiseul Magazine, disponible en kiosque depuis le 25 janvier 2024.