Le 2ème sommet Russie-Afrique qui s’est tenu les 27 et 28 juillet 2023 à Saint-Pétersbourg a dans l’ensemble été perçu comme un succès à Moscou.
Certes, seuls 17 chefs d’Etats ont fait le déplacement, contre un peu plus de quarante en octobre 2019 à Sotchi, ce que le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov a attribué à des pressions occidentales. Mais les « grands » du continent –Egypte, Afrique du Sud, Ethiopie– étaient là. Le Maroc, avec lequel Moscou a développé des liens commerciaux significatifs depuis 2014, était quant à lui représenté par son Premier ministre (de même que l’Algérie, le Président Tebboune s’étant rendu à St-Pétersbourg en juin pour le Forum économique). La seule véritable déconvenue était l’absence du Kenya, où Sergueï Lavrov avait pourtant fait une halte fin mai.
Les messages de Vladimir Poutine
Vladimir Poutine a fait passer plusieurs messages. À destination des Occidentaux, que son pays n’était pas isolé et que le « Sud global » ne boycottait pas Moscou. Aux Africains, que le « retour » de la Russie –un processus engagé en réalité dès 2006-2007– n’était pas remis en cause et qu’elle veillerait à compenser les conséquences négatives de sa récente décision de sortir de l’accord céréalier avec l’Ukraine. Aux responsables centrafricains et maliens, que les récents événements autour de Wagner n’affecteraient pas les accords sécuritaires conclus précédemment. « Divine surprise » pour le Kremlin, le coup d’Etat au Niger a permis d’illustrer ses thèses anticolonialistes et de mettre en valeur la fragilité des positions de la France.
Un effet d’essoufflement certain
Pour autant, l’impression d’ensemble qui se dégage des derniers développements de la politique russe en Afrique est plutôt celle d’un essoufflement. L’effet de rattrapage est désormais épuisé et la conquête de nouvelles positions –qu’elles soient politiques ou économiques– s’avère difficile. Le volume des échanges commerciaux entre la Russie et l’Afrique plafonnait à 18 milliards de dollars l’an dernier, contre 20 milliards avant le sommet de Sotchi de 2019. Aucun grand contrat ne semble en vue, l’échec de Rosatom en Afrique du Sud ayant marqué un coup d’arrêt et empêché Moscou de franchir un seuil. Plusieurs soutiens de Moscou –Sassou-Nguesso, Biya, Museveni– sont en fin de cycle. Et in fine, le regard que posent nombre d’Africains sur la Russie –et donc l’influence future de cette dernière– dépend dans une large mesure de l’issue du conflit en Ukraine, issue aujourd’hui incertaine.
Les intertitres sont de la rédaction. Cette tribune est à retrouver dans le premier numéro de Choiseul Magazine, paru en kiosque le 25 octobre 2023.