La restauration française voit-elle le bout du tunnel de la crise sanitaire ?
Alors que l’Insee prévoit une croissance de 6%, et que le taux de fréquentation des restaurants est envisagé à 59% en juin et 86% à la fin de l’été selon Food Service Vision, le secteur de la restauration devrait bénéficier rapidement de la reprise économique en France
La consommation des ménages (+5,2%) constitue le principal moteur de la reprise, les Français semblent en effet vouloir reprendre leurs habitudes de consommation, comme en atteste l’explosion du nombre de dépenses par carte bancaire avec une augmentation de 19% des transactions. Deux personnes sur trois sont ainsi revenues dans les restaurants, un vrai « effet covida » qui devrait se prolonger avec une saison estivale intense, en raison de la décision de nombreux Français de rester dans l’Hexagone pour leurs vacances et l’augmentation prévue de leur pouvoir d’achat, qui devrait progresser de 1,8% cette année.
Une reprise inégale et hétérogène du secteur, dépendant d’une période estivale singulière
Même si les restaurateurs ont pu compter sur les mesures de soutien du gouvernement qui ont permis d’améliorer entre 2019 et 2020 le résultat net de 59,8% selon Food Service Vision et Infolegale, la reprise du secteur est cependant difficile en raison de la perte de 33 millions de touristes en Ile de France en 2020 et de près de 28 millions cette année. Cette reprise est aussi inégale entre les types d’établissements, la restauration rapide bénéficiant ainsi des meilleures conditions pour reprendre son activité, son chiffre d’affaires de mai 2020 n’étant que de 7% inférieur aux scores de mai 2019, alors même que la restauration du self-service et la restauration de concessions tardent encore à redémarrer.
Une inégalité géo-économique peut également être constatée. Les Français, malgré leur décision de choisir des destinations circonscrites à l’Hexagone, devraient ainsi largement déserter la capitale, alors même que de nombreux restaurateurs localisés dans les quartiers d’affaires parisiens n’ont pas encore pu bénéficier d’une reprise d’activité solide en raison du télétravail et de l’absence de séminaires en présentiels.
Un risque inflationniste latent
Cette redynamisation du secteur n’est en outre pas sans contraintes en raison de l’augmentation soudaine de la demande, qui entraine une pénurie de matières premières et qui alimente une augmentation des prix notamment sur les huiles et emballages pour la livraison ou la vente à emporter.
Enfin, une difficulté majeure reste la pénurie de main d’œuvre qualifiée, avec 100 000 emplois dans l’hotellerie-restauration à pourvoir. Une situation explicable par le recours massif à l’activité partielle pendant des mois par les employeurs et la réorientation professionnelle de certains travailleurs qui ont profité des confinements successifs pour changer de secteur professionnel. Cette inadéquation entre l’offre et la demande devrait pousser les chefs d’entreprise à augmenter leurs coûts salariaux afin d’augmenter l’attractivité de la branche, ce qui devrait alimenter les craintes d’une poussée inflationniste.
Le secteur semble bénéficier de mouvements positifs mais reste méfiant face à une conjoncture incertaine et une activité en augmentation fragile qui reste encore sous-perfusion, car comme l’estime Eric Meyer, directeur du département Analyse et prévisions de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), « nous pourrons estimer la dynamique de la reprise seulement lorsque le « quoiqu’il en coûte » prendra fin ».