À l’heure ou la crise de la covid est en train de tout bouleverser au-delà même du champ sanitaire et de rebattre les cartes dans tous les secteurs d’activité, l’Institut Choiseul fait paraître une nouvelle Note Stratégique : « L’avenir de la réassurance post-covid », dont voici une synthèse.
L’économie mondiale a besoin que la réassurance se développe et se ré-organise pour que l’assurance puisse effectivement couvrir les risques qu’affrontent ses clients.
Ainsi, la réassurance est, de toutes les activités financières, celle qui va devoir se transformer le plus rapidement pour retrouver une efficacité globale dans la couverture des catastrophes et les emballements catastrophiques qu’elles génèrent.
Les éléments qui plaident en faveur d’une disruption sont nombreux et ne datent pas simplement et seulement de la crise de la Covid, mais ils se sont révélés dans toutes leurs ampleurs à cette occasion. On peut notamment retenir :
- La demande potentielle pour la réassurance n’a jamais été aussi élevée et ce marché a un besoin pressant de capitaux et d’innovations rapides.
- Les barrières à l’entrée sur les marchés de réassurance sont très élevées et ne sont pas simplement réglementaires. Elles sont aussi liées à une forme de corporatisme, typique d’un marché de très haute expertise et peut-être encore artisanal.
- Les années 2017 et 2018 ont connu des montants de sinistres catastrophiques très élevés, mais concentrés sur quelques évènements et ont montré une fragilité intrinsèque des marchés de réassurance qui peuvent absorber des évènements très importants, mais ont des difficultés à digérer des cumuls d’évènements.
- Dans les pays développés, la montée des inégalités a pour contre-partie une concentration des richesses sur quelques territoires ou sur quelques activités. L’exposition au risque de ces territoires ou activités se traduit simplement par le fait que le Sinistre Maximum Possible est en constante et rapide progression.
Dans ce cadre, la réassurance est confrontée à un double enjeu : un enjeu de consolidation, pour accroître la profondeur capitalistique et la présence sur l’ensemble de la chaine de valeur du risque afin de diversifier les risques stratégiques ; et un enjeu de souveraineté, pour bénéficier d’un secteur en mesure de tenir pleinement son rôle de soutien lorsque des acteurs ou des pans de notre économie sont fragilisés. Dès lors, diagnostic et perspectives que s’imposent et peuvent être résumés en trois points :
- La crise de la Covid, sans équivalent depuis la grippe espagnole de 1918, percute de plein fouet tous les secteurs économiques, déjà désorientés par la digitalisation et la transition énergétique. A l’instar de l’EverGreen bouchant le canal de Suez et perturbant les flux logistiques mondiaux, elle est un symptôme révélateur des nouvelles caractéristiques de notre économie mondialisée, c’est-à-dire interdépendante et aux zones de production hyperconcentrées. Une économie dont les fragilités entrent en résonnance avec la montée des risques climatiques et cyber. Bref, une économie, et une société, où les risques extrêmes croissent et où le besoin de réassurance va de pair.
- Dans ce contexte, deux éléments sont clés pour permettre aux réassureurs d’accomplir leur mission économique, celle de porter et mutualiser encore plus des risques extrêmes au niveau mondial. Le capital et le temps. Le capital, dont la profondeur permet d’absorber les chocs. Le temps, dont la profondeur de l’horizon permet d’absorber la volatilité.
Deux éléments fongibles, indissociables. De fait, le capital permet de survivre aux aléas et de se projeter dans le temps long. Le temps permet d’accumuler du capital et de remettre la volatilité à sa juste place, celle d’une écume. - Dans ce cadre, la convergence assurance-réassurance, tendance à l’œuvre dans le monde depuis quelques années (AIG-Validus, Sompo-Endurance) et dont deux acteurs majeurs de l’assurance européenne (Munich Re et Hannover Re) ont été les précurseurs avec une réussite ne souffrant guère de comparaison, apparaît comme une évidence industrielle. De fait, la superficie et la stabilité capitalistiques des métiers assurance offrent une complémentarité particulièrement efficace à la cyclicité et la volatilité des métiers de la réassurance.
Au sein des assureurs, la sous-famille des mutualistes a la double caractéristique d’un horizon temporel de long-terme et d’une capacité d’accrétion de capital inégalée du fait de leur absence d’actionnaire exigeant un dividende annuel. On ne peut donc que penser que l’exemple du couple mutualiste – réassureur offert par Talanx – Hannover Re et leur réussite frappante devrait éveiller de nouvelles vocations : faire primer la capacité d’absorption sur l’optimisation du capital se révèle, dans notre monde incertain, la stratégie la plus efficace.
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