Le Conseil d’analyse économique, chargé d’examiner en toute indépendance les questions qui lui sont soumises par le Premier ministre français, a préconisé au gouvernement de s’atteler à construire une économie résiliente, qui cible en particulier les actions publiques et les citoyens victimes de la mondialisation. Pour le CEA, il ne s’agit pas de tout relocaliser en France ou de s’opposer au processus bien entamé de la mondialisation, mais de s’attaquer à la dépendance à la mondialisation.
Afin de profiter des bienfaits de la mondialisation tout en assurant une résilience, le CAE a identifié 644 produits que les entreprises françaises importent et qui sont indispensables au processus de production. Cette dépendance met l’économie française en situation de vulnérabilité, notamment parce que ces importations sont extra-européennes et proviennent d’un nombre réduit de fournisseurs. La Chine et les Etats-Unis dominent, par exemple, le secteur de la chimie et de la pharmacie notamment la production des vitamines B3, B5, B1 ou encore les carbonates.
Relocaliser l'industrie oui, mais comment ?
Dans un rapport que France Inter a pu consulter, le Conseil d'Analyse économique propose au gouvernement une "stratégie de résilience dans la mondialisation".https://t.co/fN6Jl5cNkf pic.twitter.com/SKRger4q29— France Inter (@franceinter) April 22, 2021
Toutefois, ces 644 produits ne représentent que 4 % de la valeur des importations de la France. Le CAE affirme ainsi qu’on y trouve des minerais comme le tungstène, des produits de chimie inorganique comme l’iode, d’autres de chimie organique dont certains antibiotiques, ainsi que des appareils médicaux comme les IRM. Après avoir identifié ces produits, il s’agira pour la France “d’encourager la diversification des approvisionnements, ou des alliances stratégiques lorsque d’autres partenaires commerciaux peuvent être mobilisés, notamment au niveau européen”.
Un choix à faire entre relocalisation et diversification
La stratégie de résilience, pour être efficace, doit être calibrée en fonction de chaque produit. Si cette stratégie n’est pas mise en place, cela pourrait même nuire au plan de relance amorcé par l’Etat. Pour Philippe Martin, le président du CAE, les gains de la mondialisation “sont très diffus, mais les pertes très concentrées”. Un exemple pour illustrer cela : l’ouverture avec la Chine. En effet, les gains de pouvoir d’achat ont été massifs soit 30 milliards d’euros de pouvoir d’achat en plus par an, mais se sont accompagnés de la destruction de 104 000 postes depuis les années 2000, concentrés sur les actifs peu qualifiés. Pour que la mondialisation soit soutenable pour l’ensemble de la population et éviter une dépendance économique grave ainsi que des tensions sociales, ces secteurs doivent donc être soutenus.
Pour le CAE, il convient donc d’établir des critères pour quantifier l’efficacité des subventions publiques. Il est d’abord pour lui indispensable de mieux allouer les subventions : diversifier les approvisionnements, consacrer la majorité des subventions à l’innovation pour relocaliser la production en France dans les secteurs d’avenir ou dans des secteurs ou l’Union Européenne, a un avantage comparatif considérable. La France semble donc vouloir accompagner sa relance d’une vraie stratégie de priorisation, et les débats des prochains mois à l’approche de l’élection présidentielle devraient encore se renforcer sur ce sujet.