« Faire de Nice la ville verte de la Méditerranée » – Anthony Borré
Principal collaborateur de Christian Estrosi à la ville de Nice depuis 2011, Anthony Borré est devenu le Premier adjoint au Maire de Nice en charge de la sécurité, du logement, de la rénovation urbaine et de la politique de la ville en août dernier. Un portefeuille important qui vient récompenser cet homme de l’ombre qui participe activement à faire de Nice une smart city à la française, et qui est également le président de Côte d’Azur Habitat, premier bailleur social des Alpes-Maritimes. Plan d’urbanisme, économie, international, écologie, sécurité… Choiseul Magazine s’est entretenu avec le nouvel homme fort de la French Riviera sur les défis à venir pour Nice et sa métropole
- Vous êtes depuis l’été 2020 le premier adjoint au Maire de Nice, délégué à la Sécurité, au Logement, à la Rénovation Urbaine et à la Politique de la ville. Quelles grandes orientations de politique urbaine avez-vous en tête pour Nice ?
Sécurité/ Logement/ Rénovation Urbaine/ Politique de la Ville : des délégations pour lesquelles une parfaite transversalité des actions est fondamentale pour la réussite des projets, pour assurer un cadre de vie agréable aux niçoises et niçois, et aux habitants de la métropole en générale.
Ce portefeuille qui représente de lourdes responsabilités incarne le souhait de Christian Estrosi d’une cohérence d’ensemble de ces politiques publiques.
Diversifier et améliorer l’offre de l’habitat, désenclaver certains quartiers, requalifier les espaces publics qui le nécessitent, réinvestir le tissu urbain existant, pour lutter contre le phénomène d’étalement urbain, faire progresser l’insertion sociale et économique des habitants des quartiers, garantir un accès égal aux services publics et aux transports en commun, tout cela en garantissant la sécurité des niçoises et niçois, sont les grandes orientations de la politique urbaine souhaitée par Christian Estrosi.
- Quelle est votre vision de la ville du futur ?
Dès 2008, Christian Estrosi avait posé les bases d’une grande politique environnementale sur notre territoire avec une ambition claire et à long terme : faire de Nice la ville verte de la Méditerranée.
La politique menée en matière de mobilité urbaine s’inscrit pleinement dans cette ambition. En 2009, était lancé le premier schéma directeur du réseau de transport à l’échelle de la métropole, à horizon 2030, prévoyant notamment la création de deux nouvelles lignes de tramway.
Chaque territoire est différent, notamment au niveau géographique et par l’histoire de son aménagement. C’est pour cela qu’il est essentiel que ces grandes politiques s’appuient sur le réel. Notre métropole est tournée vers la mer et vers les Alpes, avec un bassin de vie concentré sur le littoral et plus de la moitié des 49 communes situées entre la mer et le haut pays.
Dès le départ, notre choix a été de ne pas opposer certains modes de déplacement aux autres. À Nice, nous avons voulu concilier la place de la voiture avec des transports en commun et les déplacements doux que sont les vélos et les piétons.
Christian Estrosi a souhaité au mois de juillet 2020 que le schéma des transports soit réactualisé et porté à l’horizon 2040, avec l’objectif d’une neutralité carbone du territoire en 2050 tel que fixé dans notre Plan Climat.
La ville du futur sera une ville où il est agréable de vivre, où les enjeux environnementaux seront conciliés avec ceux des déplacements, du logement, de l’aménagement du territoire dans sa globalité et cela grâce à l’innovation.
- La Ville de Nice a très tôt misé sur le numérique, devenant un modèle de smart city française. En quoi est-ce un levier d’efficacité pour les services municipaux et les habitants ?
Nous nous sommes très tôt engagés pour faire de Nice une « ville intelligente », pour s’inscrire dans une stratégie d’innovation durable, pour faire rimer smart city et safe city.
Nice Côte d’Azur fait la course en tête dans l’élite des smart cities européennes et mondiales, classée 13e smart city mondiale par le cabinet américain Juniper Research. Seule ville française du classement.
Christian Estrosi a souhaité dès 2008 placer Nice au meilleur rang des smart cities mondiales. Il s’agit de créer une métropole résiliente, capable d’anticiper les risques, d’innover dans la gestion quotidienne du territoire, et de s’adapter en temps réel aux aléas.
À Nice, nos outils en matière de sécurité sont uniques en France, avec un centre de supervision urbain créé en mars 2010, avec 3300 caméras, soit 1 pour 104 habitants, 90 agents se relayant 24h/24, une gestion centralisée de tous nos dispositifs anti-intrusion sur l’espace public. Christian Estrosi a souhaité y expérimenter et y déployer toutes les technologies de pointe.
Les données que nous collectons grâce aux objets connectés sont toutes analysées et nous permettent d’être l’un des deux seuls territoires français avec Paris expérimentant la safe city. Un champ d’action est consacré aux risques naturels auxquels un territoire aussi riche que le nôtre est confronté : inondations, séismes, incendies, avalanches.
Nous travaillons désormais sur le premier Centre d’Hypervision Urbain de France mutualisant toutes les forces de sécurité. Il assurera aussi toute la gestion de la circulation sur l’ensemble de la métropole et hébergera une Agence métropolitaine de sécurité environnementale, sanitaire et de gestion des risques.
Cette Agence environnementale et sanitaire a été souhaitée par Christian Estrosi avant même la pandémie de COVID19. Elle a pour mission d’assurer la coordination des politiques environnementales au sein de l’administration, d’anticiper tous les types de risques auxquels les habitants de la métropole sont soumis, dans un contexte de changement climatique et enfin de préparer le territoire et nos collectivités aux crises : climatiques, naturelles, sanitaires, pour en organiser les réponses les plus efficaces.
- La Tech est aussi un moteur de redynamisation de certains quartiers, comme c’est le cas du quartier Notre-Dame. Comment attirer les meilleurs talents de la tech et de l’innovation à Nice et les maintenir sur place, au profit d’un écosystème d’entreprenariat à la fois local et international ?
Nous sommes engagés depuis 2008 dans une stratégie de mutation industrielle et de diversification économique et nous avons fait le pari des nouvelles filières créatrices d’emploi (santé connectée, numérique, éco-industries, technologies de la smart city).
Rassembler autour de la même stratégie les start-ups, les groupes industriels, les acteurs de la recherche et de l’enseignement comme l’Université, pour créer une filière smart city locale complète. L’Eco-Vallée est l’épine dorsale de cette stratégie.
Nous soutenons également l’innovation des entreprises du numérique travaillant sur les technologies de la smart city : pépinière d’entreprises Nice Côte d’Azur (CEEI) qui a fait émerger plus de 155 start-ups et plus de 1100 emplois.
Certaines des start-ups accompagnées par la Pépinière d’entreprises (CEEI) Nice Côte d’Azur sont devenus des leaders mondiaux dans leurs domaines respectifs : Vulog, MyCoach, Qwant, Advansolar…
Notre stratégie smart city vise à soutenir l’attractivité de notre territoire et à aider les entreprises à s’implanter, se développer et créer des emplois. Cette stratégie porte ses fruits : 70 886 entreprises à Nice Côte d’Azur aujourd’hui (soit 26,7% en plus par rapport à 2012).
La création d’entreprises est un enjeu stratégique qui participe pleinement au dynamisme du territoire et à la création d’emplois locaux. Avec le Maire, nous sommes mobilisés aux côtés des entreprises innovantes faisant le pari du numérique et des nouvelles technologies.
La Ville de Nice a donc souhaité renforcer cette démarche en implantant au cœur du quartier Notre-Dame (quartier en pleine reconquête urbaine), le bâtiment Totem de la French Tech Côte d’Azur, qui a été inauguré en février 2020, où seront installés une dizaine de start-ups sur 120m².
- Vous présidez Côte d’Azur Habitat. Quelles y sont vos priorités ? La construction immobilière à Nice est dynamique et la ville affiche un fort taux de propriétaires. Pour continuer à loger des nouveaux arrivants, la densification de certains quartiers vous semble-t-elle une solution ?
Mes priorités sont les suivantes : être toujours plus proche et à l’écoute des locataires qui souffrent de la crise. Dans le même temps, il faut être intraitable avec ceux qui sont les ennemis de la République. Je veux donc renforcer la sécurité des locataires.
Les enjeux à la tête de Côte d’Azur Habitat sont donc multiples et ne peuvent se résumer à la création de logements. J’ai également pour ambition d’agir sur le logement indigne, sur la diversification de l’offre, sur l’accession à la propriété par la vente de logements du parc de Côte d’Azur Habitat.
- Vous êtes également Vice-Président de la Métropole Nice Côte d’Azur. Comment envisagez-vous le rôle d’une telle métropole dans le paysage régional et national ?
Dès le départ, Christian Estrosi a compris les opportunités qu’offraient la création de la métropole. C’est pour cela que la Métropole Nice Côte d’Azur est la première métropole créée en France. Avec la mise en place d’une véritable gouvernance collégiale, les 49 maires de la métropole œuvrent au quotidien pour un aménagement cohérent de notre territoire, qui a de fortes particularités (entre mer et montagne), pour le rayonnement de notre territoire à l’échelle nationale également. Le poids de la métropole, sa capacité d’agir sont aujourd’hui reconnus.
Déjà lors de la crise sanitaire, la métropole a permis de faire bénéficier l’ensemble des communes de la logistique et de la force d’action exemplaire de notre structure. La solidarité s’est ensuite particulièrement illustrée dans le cadre de la gestion de la tempête Alex. L’assistance aux sinistrés, le rétablissement des réseaux, la réouverture des routes, rien n’aurait été possible sans une structure telle que la Métropole Nice Côte d’Azur.
Peser à l’échelle nationale, voire internationale, agir localement avec pour mot d’ordre la solidarité, voilà comment j’envisage donc le rôle de la métropole.
- La ville de Nice et, plus globalement, la Côte d’Azur, constituent un pôle qui existe et qui a une identité forte sur la cartographie des spots touristiques mondiaux. Comment entendez-vous consolider et renforcer cette image unique ?
Les atouts de notre territoire sont nombreux. Nous allons poursuivre notre politique ambitieuse pour que Nice et la métropole demeurent des références.
Nous bénéficions d’un aéroport international qui dessert 121 destinations directes (2ème aéroport international de France, 14,5 millions de passagers, 65% de trafic international), c’est un réel atout pour notre développement et pour notre projet de faire de Nice et de la métropole un territoire innovant de renommée internationale.
Nous avons également développé les espaces permettant d’accueillir de grands évènements internationaux (Stade Allianz Riviera, Palais Nikaïa repris en régie en 2018).
Nous organisons plus de 500 manifestations culturelles (Carnaval de Nice, Nice Jazz Festival, de grandes expositions telles que Matisse/Picasso l’an dernier), et près de 200 manifestations sportives de haut niveau (Paris-Nice, Ironman Nice, Coupe féminine de Football, Grand départ du Tour de France en 2020, Coupe du monde de Rugby en 2023, …).
Nous souhaitons à présent exporter les événements de la ville de Nice, comme nous l’avons déjà fait pour le Carnaval en Chine.
Quant à l’accueil d’événements d’envergure et au développement du tourisme d’affaire, le projet du futur Palais des Expositions à l’Ouest de la Ville est à la hauteur de nos ambitions.
- Ville historiquement frontalière, Nice est ouverte sur l’Italie et toute la Méditerranée. Comment s’inscrivent la Ville et sa métropole au sein de l’arc méditerranéen ? Quel rayonnement, quels partenariats peut-on imaginer à l’avenir vers la Méditerranée orientale et le continent africain ?
L’histoire, la culture et la géographie octroient à Nice et sa métropole une place centrale au sein de l’arc méditerranéen.
L’héritage gréco-romain, l’appartenance successive au Comté de Provence, à la maison de Savoie puis au Royaume de Piémont-Sardaigne avant de devenir la capitale mondialement connue de la Côte d’Azur expliquent l’attachement, le fort sentiment d’appartenance de Nice à la Méditerranée.
En tant que Présidente du réseau Euromed qui réunit des villes du périmètre de l’Union pour la Méditerranée (Etats membres de l’UE et de Méditerranée occidentale et de Méditerranée Orientale), la Métropole Nice Côte d’Azur compte jouer un rôle important afin de favoriser la promotion d’échanges de bonnes pratiques notamment dans les domaines du développement durable, de l’innovation et de la sécurité avec comme leitmotiv de multiplier les partenariats, d’être à l’écoute et d’impliquer la jeunesse.
Par ce biais, Nice souhaite affirmer la voix des villes et des décideurs locaux face aux différents défis régionaux en Méditerranée. En résumé, la coopération entre nos territoires n’a jamais été aussi nécessaire et urgente. C’est en construisant de nouveaux ponts, en unissant nos deux rives par des liens toujours plus étroits que nous pourrons trouver collectivement des solutions.
Dans le cadre de son schéma de coopération transfrontalière adopté en 2019, la Métropole Nice Côte d’Azur a défini quatre échelles stratégiques : une échelle de proximité « Littoral » et « Moyen Pays », une échelle de coopération « Montagne », une échelle d’innovation inter métropolitaine avec les métropoles de Gênes et de Turin ainsi qu’avec la Principauté de Monaco et une échelle macro-régionale alpine, méditerranéenne et européenne.
Cette dernière définit le positionnement de Nice à l’échelle des grands espaces de coopération et au sein du partenariat de ces macro-régions, pour se positionner dans des projets financés notamment par les programmes européens (INTERREG transfrontalier et transnational, instrument de voisinage…), pour affirmer la voix métropolitaine de Nice, Turin et Gênes dans les stratégies alpines et méditerranéennes et pour structurer les transports transfrontaliers de la façade méditerranéenne.
À l’image de l’accueil en 2019 du « Choiseul Africa Business Forum », Nice croit en l’avenir de l’Afrique et affirme sa volonté de devenir un hub pour les échanges entre deux continents qui ne sont pas séparés mais unis par la Méditerranée.
Nous avons en effet la conviction que la mise en valeur à Nice des réussites eurafricaines tournées vers l’innovation, la création de nouveaux partenariats et le dialogue entre les représentants de près de 50 pays a permis d’instaurer une nouvelle dynamique.
Pour conclure, je voulais vous dire que la Méditerranée nous oblige, sa civilisation plusieurs fois millénaire nous impose un devoir. Celui de devenir un modèle de développement durable et d’échanger avec nos partenaires afin que les bords de la Méditerranée soient toujours plus verts et agréables à vivre. Nous avons en effet la responsabilité de protéger et de transmettre aux générations futures cette culture commune qui inspire l’humanité.